L'harmonisation internationale des états financiers améliore-t-elle la lisibilité de la performance des entreprises ? Particulièrement complexe, la norme IFRS trouble les investisseurs, certains experts et certains praticiens de l'analyse financière.
Les normes comptables françaises sont gérées par l’ANC (Autorité des Normes Comptables). Le plan comptable général (PCG) est le principal standard de comptabilité pour les états financiers annuels de toutes les entreprises françaises.
Cependant, les groupes et entreprises axés sur les marchés financiers doivent présenter les états financiers harmonisés dont l’objectif est de fournir des informations comparables sur le plan international pour des investisseurs, les préteurs et les directions générales des finances publiques.
Le rôle d'EFRAG est d’influencer le développement des normes IFRS d'un point de vue européen, contribuer à l'efficacité des marchés de capitaux et fournir des conseils d'approbation sur les (modifications des) normes IFRS à la Commission européenne.
Les 2 principales normes internationales IFRS et US-GAAP imposent leurs propres règles et modifient certains points de l’analyse financière issue du Plan Comptable Général français.
Les normes IFRS (International Financial Reporting Standards) émises par l’IASB (International Accounting Standards Boards) dans la continuité des normes IAS appliquées dans plus de 150 juridictions, notamment au Canada, en Australie, en Nouvelle-Zélande, en Chine, au Brésil, en Argentine, au Mexique, en Russie, en Arabie-Saoudite, au Japon, en Afrique du Sud, …
Les normes US-GAAP (Generally Accepted Accounting Principles) émises par le Comité des normes comptables et financières ou Financial Accounting Standards Board (FASB) nécessaire pour avoir une cotation à la bourse américaine
L’application des normes IFRS en Europe adoptée par le Parlement européen et le Conseil, a été publié au journal officiel du 19 juillet 2002.
Depuis le 1er janvier 2005 les sociétés cotées en bourse européennes sont tenues de préparer leurs comptes consolidés conformément aux normes comptables internationales adoptées par l’UE.
Les normes IFRS étant difficile à appliquer dans les PME, un référentiel simplifié, appelé « référentiel IFRS entités privées » ou « IFRS PME » a été créé mais n’a pour le moment pas de caractère obligatoire.
Un certain nombre de normes IFRS représentent un changement majeur dans l’information financière qu’il faut connaitre
IFRS 15 : PRODUITS DES ACTIVITES ORDINAIRES TIRES DE CONTRATS CONCLUS AVEC DES CLIENTS
Depuis 1er janvier 2018, la norme IFRS 15 a modifié les règles de comptabilisation du chiffre d’affaires
L’objectif est de détailler les informations pour présenter le plus fidèlement possible les éléments constituants la vente de services ou de biens à un client, avec un montant correspondant à chaque prestation
Elle s’applique pour tous les types de contrats conclus avec un client et dans tous les secteurs d’activité.
Exemple : La fournitures d’ordinateurs et l’assistance technique sont 2 prestations qui seront différenciées en chiffre d’affaires.
IFRS 16 : CONTRAT DE LOCATION
Trés critiquée pour ces effets sur l'analyse économique, la norme IFRS 16, entrée en vigueur le 1er janvier 2019, a remplacé la norme IAS 17.
Contrat de location
Avec IFRS 16 tous les contrats de location (location financement et location simples) sont immobilisés pour les locations caractérisées par :
Une durée supérieure à 12 mois
Une valeur d’achat de l’actif loué supérieure à 5 000 €
Un contrôle et un droit d’utilisation
La première valorisation établie en début de contrat correspond à la valeur actualisée des paiements futurs de loyers et est présentée comme une « acquisition ».
Le mode d’amortissement linéaire sur la durée d’utilité de l’actif est habituellement retenu
il est possible de ne pas appliquer IFRS 16 si le montant du contrat est inférieur à 5000 dollars Américain ou si la durée du contrat est inférieure à 1 an.
Impact sur le bilan :
Le cumul des loyers futurs actualisés est comptabilisé à l’actif comme un droit d’usage (immobilisation), et au passif comme un engagement locatif en passif financier non courant et passif financier courant pour la partie décaissable à moins d’un an.
La durée de la location (durée sur laquelle les loyers sont cumulés) est égale à la période non résiliable du contrat à laquelle s’ajoute :
La durée au-delà de l’option de prolongation, s’il est raisonnablement certain que le preneur exerce cette option ;
La durée au-delà de l’option de résiliation, s’il est raisonnablement certain que le preneur ne l’exerce pas ;
Un jugement est donc souvent nécessaire pour déterminer la durée sur laquelle les loyers futurs sont immobilisés. Ainsi, si la durée d’amortissement des agencements excède notablement la période non résiliable, il est raisonnablement certain que la durée de la location continuera au-delà de cette période non résiliable.
Impact sur le compte de résultat :
Le droit d’usage est amorti sur la durée de la location. L’amortissement se substitue à un loyer décaissé. Par conséquent, l’Ebitda augmente ;
Les paiements relatifs à l’engagement locatif sont considérés comme un remboursement d’emprunt. Seule la part d’intérêt figure en charge, la part en capital venant en diminution de l’emprunt. Le résultat opérationnel courant s’améliore du montant des frais financiers comptabilisés dans le résultat financier.
Ce mode de comptabilisation dégrade légèrement le résultat net au début de la location, car les amortissements sont généralement linéaires et la part d’intérêt dégressive avec la durée.
Impact sur le flux de trésorerie :
Le flux de trésorerie de l’activité augmente, car l’amortissement du droit d’usage se substitue au loyer décaissé sur la période. En outre, les frais financiers sont parfois reclassés dans le flux de trésorerie du financement.
À l’inverse, le flux de trésorerie du financement se dégrade car les paiements de loyers sont désormais considérés comme un remboursement d’emprunt pour la part en capital.
Remarques :
Le traitement en amortissement et en frais financiers d’une charge d’exploitation décaissable parait peu pertinent. Les indicateurs de performance d’exploitation et financière sont modifiés
La comparaison avec les comptes en Plan General Comptable (France) et en normes américaines sont plus difficiles
IFRS 9 : LES INSTRUMENTS FINANCIERS
Applicable depuis le 1er janvier 2018, la norme IFRS 9 a introduit plusieurs changements quant à la valorisation et au classement des instruments financiers
Particulièrement complexe la norme IFRS 9 indique le traitement comptable des instruments financiers.
Qu’est-ce qu’un instrument financier :
Les instruments financiers sont des titres ou des contrats qui peuvent être négocier sur les marchés réglementés.
Il s’agit des actions (actions ordinaires, actions de préférence, titres de participation), des obligations (à taux fixe, à taux variable, indexées, amortissable ou in fine, zéro coupon) , des titres de créances négociés (bons du trésor à taux fixe-BTF, certificat de dépôt, billet de trésorerie, bons à moyen terme négociables, bons du trésor à taux fixe et intérêts annualisés -BTAN) , des produits hybrides, des organismes de placement collectif (OPCVM : FCP ou SICAV, FIA) , des produits dérivés (forward, futures, swap) et produit dérivés conditionnels (calls, puts) commun de placement.
Les instruments financiers en IFRS ont été étendus :
Aux actifs financiers non représentés par des titres ou des contrats, comme les créances clients ou les liquidités des actifs financiers non représentés par des titres ou des contrats, comme les créances clients ou les liquidités.
Aux passifs financiers comme les dettes fournisseurs, les emprunts ou les crédits de trésorerie.
Deux méthodes sont utilisées en normes IFRS pour valoriser un actif financier :
Le coût amorti. Le coût amorti par définition ne peut s'appliquer qu'aux instruments de créances (prêts, créances, obligations...). Son utilisation est pertinente dans la mesure où l'entreprise a l'intention de conserver l'instrument jusqu'à son échéance car cette méthode permet une stabilité du résultat.
Ou la juste valeur. La juste valeur matérialise l'intention de vendre un actif, traduit l'exposition au risque et en définitive amène de la volatilité dans le compte de résultat.
Donc quand l’instrument financier est donc un actif financier, il peut être comptabilisé :
Soit en cout amorti (valeur actuelle des flux de trésorerie attendus sur la durée de vie restante de l'instrument financier, actualisés au taux d'intérêt effectif) dans le cas où l’entreprise a l’intention de conserver l’instrument jusqu’à son échéance (exemple : prêt, créances, ...). L’actif est enregistré au bilan pour sa valeur historique (juste valeur initiale)
Soit en juste valeur par capitaux propres dans le cas d’actions achetées, les plus ou moins-values latentes sont inscrites en capitaux propres et :
Seront recyclés en résultat au moment de la revente si l’entreprise a l’objectif de revendre après avoir collecté un certain nombre de flux financiers issus de ceux-ci
Ou optionnellement en résultat non recyclable pour les actions non détenues à des fin de trading ou de placement. En conséquence, les plus et moins-values réalisées ne transiterons jamais en résultat. Seuls les dividendes seront enregistrés en résultat.
En fait, un actif financier est comptabilisé en juste valeur par résultat par défaut, sauf s'il répond aux conditions applicables aux deux autres catégories. C’est-à-dire pour échapper à la valorisation à la juste valeur par résultat deux conditions sont à remplir :
Le test SPPI (solely payment of principal and interests), les flux de trésorerie de l’actif sont uniquement le remboursement du principal et des intérêts sur le principal restant dû (exemples : créances client, prêts...),
Le business model peut prendre deux formes :
Soit percevoir les flux de trésorerie contractuels et garder jusqu’à l’échéance
Soit percevoir les flux contractuels et vendre l'actif (Held To Collect & Sale).
Quand l’instrument financier est un passif financier, il peut être comptabilisé :
Soit en cout amorti (valeur actuelle des flux de trésorerie attendus sur la durée de vie restante de l'instrument financier, actualisés au taux d'intérêt effectif) dans le cas où l’entreprise a l’intention de conserver l’instrument jusqu’à son échéance (exemple : prêt, créances,)
Soit en juste valeur par résultat dans le cas où l’entreprise a l’objectif d’achat et de revente par rotation élevé de l’instrument financier
IFRS 13 : JUSTE VALEUR
La juste valeur (ou « fair value ») est une norme comptable consistant à valoriser, à la date de clôture du bilan, les actifs et les passifs des grandes entreprises selon leur valeur de marché ou à défaut selon leur valeur calculée par la somme actualisée des flux de revenus attendus de leur utilisation.
Cette norme comptable s’oppose à la norme française de la « valorisation au coût historique », qui valorise actifs et passifs à leur date d’achat sur les marchés. Ceci avait pour effet de figer dans le bilan des entreprises une valeur parfois très éloignée de leur valeur réelle
La norme distingue trois catégories de technique d’évaluation :
L’approche par le marché qui repose sur les prix de transaction :
1er niveau : cours sur des marchés actifs pour des actifs ou passifs identiques
2ème niveau : cours sur marché inactif pour un actif identique ou similaire, ou le cours de bourse pour un actif similaire observé sur un marché actif.
3ème niveau : toutes les données non observables qui sont les données propres à l'entité
L’approche par les coûts qui s'appuie sur l'estimation du coût de remplacement d'un actif par un autre actif apportant les mêmes services,
L’approche par les revenus (Cash-flows futurs actualisés)
IAS 36 prévoit que la valeur comptable d’un actif ne peut être supérieure à sa valeur « recouvrable ». La valeur recouvrable est, quant à elle, le montant le plus élevé entre la valeur « vénale » et la valeur « d’utilité » :
La valeur vénale d’un actif correspond à la juste valeur (ou valeur de marché qui correspond au prix estimé de revente) diminuée des coûts de la revente ;
La valeur d’utilité correspond à la somme des revenus générés grâce à l’exploitation de l’actif.
Cette norme s'applique à chaque fois qu'une norme comptable exige la valorisation d'un actif ou d'un passif à la juste valeur et donc à chaque date de fin d’exercice, il convient de déterminer s'il existe une perte de valeur.
La perte de valeur peut être liée à l’environnement externe : dégradation de la conjoncture, rupture technologique, changement de réglementation, capitalisation boursière devenant inférieure aux capitaux propres comptables ,….
Il peut aussi être interne : obsolescence ou diminution de rendement des actifs, décision de restructuration
Si tel est le cas, Une perte de valeur (impairement) doit être comptabilisée lorsque la valeur recouvrable est inférieure à la valeur comptable des actifs En outre, si un écart d’acquisition (goodwill) a été constaté, le test de dépréciation doit être réalisé annuellement.
IFRS 3 : GOODWILL
La norme IFRS 3 impose la reconnaissance d’un goodwill lors des opérations de regroupement d’entreprises. Le goodwill est une survaleur payée en contrepartie d’avantages économiques escomptés. Le goodwill est soumis à un test de dépréciation annuel. Une dépréciation constatée présente un caractère irréversible. Les écarts d’acquisition dont la durée d’utilisation est limitée sont toujours amortissables à concurrence de cette période ou, si elle ne peut être fixée de façon précise sur 10ans.
Remarque:
Les dépréciations de goodwill peuvent signaler aux investisseurs que le groupe a surpayé une acquisition récente par rapport à sa nouvelle perspective de flux de trésorerie.
Annexes :
Les autres éléments du résultat global en normes IFRS
Selon le référentiel IFRS les éléments du résultat sont enregistrés :
Soit dans le résultat net
·Soit dans les capitaux propres regroupés en autres éléments du résultat global (Other Comprehensive Income en anglais) intégrant principalement l’effet de de la juste valeur, l’effet de de change ou la couverture de trésorerie.
Le résultat global intègre :
Le résultat net dépendant de la performance de l'activité de l'entreprise
Et les autres résultats enregistrés dans les capitaux propres et classés en résultat recyclables ou non recyclable indépendants de la performance opérationnelle de l'entreprise.
Le résultat net comprend :
Le résultat d’exploitation
Le résultat financier
Le résultat exceptionnel occasionné par des produits et des charges liés à un événement majeur et inhabituel, c’est-à-dire:
Non lié à l’exploitation normale et courante de l’entité et
Pas produit au cours des derniers exercices et dont la probabilité qu’il se reproduise dans les exercices suivants est très faible.
Le résultat exceptionnel est ignoré selon l’IFRS.
Les autres éléments du résultat intégrent éléments des résultats recyclables et non recyclables c'est à dire :
Eléments non recyclables en résultat :
Ecarts de réévaluation des immobilisations corporelles ou incorporelles exigées en comptabilisation à la juste valeur (IAS 16 et IAS 38),
Pertes et gains actuariels des engagements de retraite à prestations définis (IAS 19),
Eléments recyclables en résultat :
Ecarts de conversion en consolidation des filiales dont les comptes sont établis en devises étrangères (IAS 21),
Les variations de juste valeur des titres disponibles à la vente (AFS IAS 39),
Partie efficace des profits et pertes sur couverture de flux de trésorerie (CFH IAS 39)
Les différents taux d’actualisation
Le taux d’actualisation (ou discount rate en anglais) correspond au taux de rentabilité attendu cumulant le taux sans risque auquel est ajouté un taux de prime de risque dépendant des domaines concernés. Ce taux permet de calculer la valeur des flux futurs à la date d’aujourd’hui et de comparer la somme de ces flux à l’investissement initial ou à une solution alternative
La norme IFRS impose dans certains cas la méthode d’actualisation :
IAS 19 : Avantages du personnel. On actualise les obligations au titre des avantages postérieurs à l’emploi.
IAS 36 : Dépréciation d’actifs. On détermine la valeur recouvrable d’un actif.
IAS 37 : Provisions, passifs éventuels et actifs éventuels. On détermine la valeur actuelle des dépenses attendues que l’on pense nécessaires pour éteindre une obligation.
IFRS 13 : Évaluation de la juste valeur. On fixe la juste valeur d’un actif ou d’un passif.
IFRS 16 : Contrats de location. On l'utilise pour déterminer le montant de la dette de loyer
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